[06/05 – 17/06/23] “INNER MATTER”, CURATED BY ANNE-LAURE LEMAITRE, W/ SHONA MCANDREW, SYDNEY VERNON & NADIA WAHEED

[FR]
La galerie présente “Inner Matter” du 6 mai au 17 juin 2023, sur une proposition d’Anne-Laure Lemaitre, curatrice franco-canadienne basée à New York, avec les artistes américaines Shona McAndrew, Nadia Waheed et Sydney Vernon. Cette exposition interroge, à travers la peinture et le dessin, le rapport au corps qu’entretiennent chacune des trois artistes, et comment le format du portrait peut devenir un outil d’acceptation de soi, d’émancipation et d’introspection.
Dans l’interstice qui sépare un corps d’un autre existe un univers, un espace composé de perceptions et de relations physiques entre êtres et objets. Nous appréhendons en partie notre environnement à travers un prisme rationnel érigé par expérience, logique et compréhension commune. Mais qu’existe t’il au-delà de marqueurs concrets, de connexions spatiales et temporelles ? Au-delà du tangible, le personnel et l’intime tissent une toile, une trame intérieure; un alliage immatériel, amalgame de souvenirs et de sensations à travers lequel nous comprenons le monde. Cet espace, unique à chacun, nous habite et nous différencie. Une définition de soi se construit en cercles concentriques: le soi privé, le soi personnel, le soi public. Le soi privé, aux contours impalpables et invisibles à tout autre, est le berceau de nos multiples complexités. Transcrire cet espace particulier en langage visuel, incarnant l’imperceptible – une réalité matérielle, mais également héréditaire, émotionnelle et spirituelle – est au cœur de la pratique des trois artistes présentées dans “Inner Matter”. 

Shona McAndrew (née en 1990 à Paris, vit et travaille à Philadelphie) porte un regard tendre et aimant sur ses sujets, représentés dans de rares moments d’abandon et de vulnérabilité où, baissant leur garde, ils peuvent simplement « être », loin des définitions et des jugements imposés par un regard extérieur autre, forcément réducteur. Ces portraits et autoportraits offrent un espace de paix et de repos, d’acceptation et d’accueil rare et salutaire, en contraste avec une violence perceptive à la fois autre et inexorable.
Employant son propre corps comme prémisse à une recherche identitaire complexe, Nadia Waheed (née en 1992, originaire du Pakistan, vit et travaille à Austin) sonde les profondeurs d’une représentation de soi réelle et plurielle. Le corps est un vaisseau, un point d’origine métaphysique autant que corporel. Explorant des relations existentielles liées au soufisme et à des formes de pensées magiques traditionnelles, elle crée un espace de vie où plans éthérés et physiques se rejoignent et s’allient.
Utilisant la repossession de documentation photographique familiale comme base pour ses compositions partiellement autobiographiques et partiellement fictionnelles, Sydney Vernon (née en 1995 aux USA, vit et travaille à Baltimore) cherche à interroger cette mémoire intergénérationnelle spécifique, au sein d’un contexte social et historique complexe. Ses œuvres, alliant dessin, peinture et collages, offrent une approche poétique intégrant le personnel comme marqueur universel.

L’esprit humain tend à définir, réduire, catégoriser; à créer un lieu circonscrit pour chaque chose et pour chacun, afin de pouvoir donner sens du monde. Dans une société exponentiellement dystopique et dichotomique, revendiquer une complexité et une pluralité subtiles, au-delà de marqueurs différentiels réducteurs et limitatifs, est un acte fort à la fois introspectif et radical.
En prenant ancrage dans un format séculaire classique, comme le portrait, pour établir une pratique dépassant les normes conventionnelles du genre, Shona McAndrew, Nadia Waheed et Sydney Vernon offrent une mise en abyme, une redéfinition moins linéaire de l’idée de portrait en tant que représentation d’un sujet, mais également d’un auteur. Évocatives, éminemment spécifiques et uniques, leurs pratiques ont valeur d’incantations. Elles concrétisent en présence palpable substantielle les profondes fondations par lesquelles nous nous connectons individuellement à une réalité commune, qui demeure cependant protéiforme et plurielle. 

[ENG]
Galerie LJ presents “Inner Matter” from May 6 to June 17, 2023, curated by Anne-Laure Lemaitre, with American artists Shona McAndrew, Nadia Waheed and Sydney Vernon. This exhibition questions, through painting and drawing, the three artists’ relationship to the body, and how portrait can become a tool for self-acceptance, emancipation and introspection.
In the interstice that separates one body from another exists a universe, a space composed of perceptions and physical relations between beings and objects. We apprehend in part our environment through a rational prism erected by experience, logic and common understanding. But what exists beyond concrete markers, spatial and temporal connections? Beyond the tangible, the personal and the intimate weave a web, an inner weave; an immaterial alloy, an amalgam of memories and sensations through which we understand the world. This space, unique to each of us, inhabits us and differentiates us. The definition of self is built in concentric circles: the private self, the personal self, the public self. The private self, with impalpable contours invisible to all others, is the cradle of our multiple complexities. Transcribing this particular space into visual language, embodying the imperceptible – a material reality, but also hereditary, emotional and spiritual – is at the heart of the practice of the three artists presented in “Inner Matter”.
Shona McAndrew (born 1990 in Paris, lives and works in Philadelphia) takes a tender and loving look at her subjects, portrayed in rare moments of abandonment and vulnerability where, letting down their guard, they can simply “be”, far from the definitions and judgments imposed by another, inevitably reductive, external view. These portraits and self-portraits offer a space of peace and rest, of acceptance and welcome that is rare and salutary, in contrast to a perceptive violence that is both other and inexorable.
Using her own body as a premise for a complex search for identity, Nadia Waheed (b. 1992, originally from Pakistan, lives and works in Austin) probes the depths of a real and plural representation of self. The body is a vessel, a metaphysical point of origin as much as a corporeal one. Exploring existential relationships with Sufism and traditional magical thought forms, she creates a space of life where ethereal and physical levels meet and merge.
Using the repossession of family photographic documentation as the basis for her partly autobiographical and partly fictional compositions, Sydney Vernon (b. 1995, lives and works in Baltimore) seeks to interrogate this specific intergenerational memory within a complex social and historical context. Her works, combining drawing, painting and collage, offer a poetic approach that integrates the personal as a universal marker.

The human mind tends to define, reduce, categorize; to create a circumscribed place for everything and everyone in order to make sense of the world. In an exponentially dystopian and dichotomous society, claiming a subtle complexity and plurality, beyond reductive and limiting differential markers, is a strong act that is both introspective and radical.
By anchoring themselves in a classic secular format, such as portraiture, to establish a practice that goes beyond the conventional norms of the genre, Shona McAndrew, Nadia Waheed and Sydney Vernon offer a “mise en abyme”, a less linear redefinition of the idea of portraiture as a representation of a subject, but also of an author. Evocative, eminently specific and unique, their practices are like incantations. They concretize in substantial palpable presence the deep foundations by which we connect individually to a common reality, which remains however protean and plural.

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